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Jo, Coeur de Louve
BONJOUR À TOI, MON AMI(E) KWÉ ! BONNE VISITE!

 

pirate'sisland

 

19 juillet 2007

V. La flèche

Elfes
Image: Free4UWallpapers



Partie V.  La flèche

Lorsque je la vis, si triste, mon cœur se serra.  Je ne savais que faire pour la consoler.  Je me rappelai que j’avais pris avec moi le matin, une petite friandise en sucre, un minuscule petit cœur.  Sans réfléchir, je me précipitai vers elle pour le lui donner.  Je dû lui faire très peur.  En une seconde, elle bondit sur ses pieds, prit son arc de son épaule et y plaça une flèche.  Avant que je n’aie eu le temps de faire deux pas, j’étais déjà en joue.  Je songeai qu’elle était bien courageuse et qu’elle méritait bien d’être la reine des Elfes.  La seconde suivante, elle était suspendue en l’air tout près de mon nez.

- Arrête immédiatement !… N’avance pas plus loin,…  sinon je devrai décocher ma flèche sur toi!…  C’est la loi!

Elle avait voulu dire ça d’une façon forte et autoritaire,  mais sa voix entrecoupée de sanglots n'avait fait que trahir sa peine encore plus.  De courtes inspirations saccadées secouaient tout son petit corps,  son visage tout mouillé de larmes me bouleversait.  Loin de me faire peur, elle m’avait profondément émue.

- Quelle loi? Mais non … je t’en prie il ne faut pas avoir peur de moi, je ne te veux aucun mal petite Reine.  Je voulais te donner ceci pour te consoler.

Je m’étais reculée d’un pas et j’avais placé la sucrerie sur une branche basse près de nous.  Je m’assis sur le sol et je l’observai.  Elle regardait le petit cœur vermeil saupoudré de sucre qui brillait sur la branche.  Curieuse, elle s’en approcha,  puis comme si elle avait décidé soudain de me faire confiance, elle rangea son arme, prit le bonbon, le déposa au cœur de sa rose et se rassoyant sur un des pétales de soie, posa sur moi son regard triste.  Au bout d’un moment, je lui fis un sourire et lui dit doucement :

- Pourquoi pleure-tu ?

- Je pleure sur ma rose, c’est le temps des épines pour elle.
   
- Mais… le temps des épines?  Et c’est pour ça que tu es si malheureuse?

L’incompréhension devait se refléter sur mes traits.  Elle leva les yeux au ciel et poussa un profond soupir.  Sans le vouloir je l’avais visiblement agacée.

- Ah vraiment! Les êtres humains ne comprennent jamais rien !!  Ne sais-tu pas que pour une rose, construire des épines est une tâche très éprouvante?  Un travail pénible et exténuant? Ma pauvre rose a tant de peine à les fabriquer qu’elle se meurt de fatigue.  Êtes-vous à ce point aveugles et insensibles pour ne pas le voir?

Mais non, c’était vrai.  Nous n’en savions rien.  Bien trop préoccupés par les choses "importantes" qui agitaient nos vies,  il y a bien longtemps que nous ne savions plus regarder les roses.
 
En cet instant, j’avais honte d’être si désespérément … humaine.
 
- Alors c’est pour ça que tu voulais me tuer avec ta flèche?  Tu avais peur pour ta rose?

Durant une trop brève seconde  son visage s’éclaira,  il me sembla même avoir vu l’esquisse d’un sourire.  Enfin, les pleurs s’étaient arrêtés.
 
- Que dis-tu voyons!  Mes flèches ouvrent les cœurs, les attendrissent et en nul cas elles ne sauraient blesser.  Ah, ces  humains !
 
- Pardonne mon ignorance, mais comment en ce cas peux-tu défendre ta rose?

Son sourire était revenu et je n’aurais pas su en dire la raison mais de la voir heureuse à nouveau me remplissait littéralement de joie.  Soudain, il faisait très beau.

Gentiment, elle se mit à m’expliquer.

- La compassion,  lorsqu’elle touche l’âme, est une arme bien plus efficace que le plus cruel des canons.  L’amour quoi qu’on en dise,  restera toujours plus puissant que le mal et que la haine.  Ma flèche a pour effet de faire battre le cœur au diapason avec l’univers, en harmonie avec la nature et les choses invisibles.  Impossible alors de cueillir les fleurs et encore moins les roses.  Tu comprends maintenant?

- Je vois.  Être en harmonie complète avec la nature et l’invisible.  Elle  me fait presque envie cette flèche.  J'aimerais que tu ouvres aussi mon coeur.
 
- Il y a cependant quelques effets secondaires dont je dois te prévenir.  Elle m’avait fixé longtemps de ses yeux d'azur avant de rajouter:
 
- Ton cœur sera lié au mien pour toujours.
 
- Je n’ai pas peur, prépare ton arc.

- Tu es bien certaine que c’est ce que tu veux?

- Certaine.

- Mais quand j’aurai peur, tu trembleras.

- Je tremblerai.

- Et quand j’aurai mal, tu souffriras.

- Je souffrirai.

- Et quand je serai malheureuse, tu pleureras.

- Alors, je pleurerai.

- Mais pourquoi?

- Parce que quand tu riras, le son de ce rire me donnera envie de chanter.  Et quand tu me feras un sourire, ce sera comme si le soleil tout à coup se mettait à briller plus fort.  Et quand tu seras heureuse, la vie paraîtra plus belle.

---

Je n’avais presque rien senti, à peine une petite piqûre, une douce chaleur avait envahi ma poitrine.  Ce fut comme si tout à coup, j’avais ouvert les yeux :  Les couleurs étaient devenues plus vives, plus brillantes.  Les bruits venaient à mes oreilles si clairs,  je pouvais à présent entendre  les petits elfes parler entre eux :

- Mais qui est-ce?

- Qui est-ce donc?

- C’est une humaine, une femme.

- C'est bien vrai? Vous en êtes sûrs?

- Qu’est-ce qu’ils sont grands!

- Est-ce qu’ils ont des ailes?

- ...

Je ressentais des émotions que je n'avais jamais ressenties avant, je voyais des couleurs que mes yeux ne reconnaissaient pas,  j'entendais des sons nouveaux à mes oreilles.  Je découvrais un monde que je n'avais encore jamais vu.

Un murmure incessant comme une musique emplissait l'air, c’était un son doux et langoureux, une mélodie berçante qui semblait arriver tout droit du paradis.  Je m’aperçu que cette douce mélodie, en réalité, venait  du jardin, c’était les fleurs qui chantaient sous le vent.  Les oiseaux et les cigales gazouillaient.   Une merveilleuse symphonie s’élevait du cœur de la forêt,  ses harmoniques montaient vers le ciel en un chant magnifique, divin. Puis un cri étrangement familier au dessus de ma tête:
 
- Brou... ou... Bonjour à toi mon amie!…  brou… Bonjour bonjour! … brou…  Je suis là … broubrou… avec toi…

- Grand Duc! Tu parles?!

- Bien sûr… brou brou… Depuis toujours … brouuuu…  Mais tes oreilles … étaient sourdes…  tu ne pouvais m'entendre.

J’étais abasourdie.  Tant de choses qui nous étaient inconnues, invisibles.  Tant de beauté.  Mon esprit s’ouvrait à l’univers,  je comprenais tout, j’avais toutes les réponses.  Je savais.  Je savais également pourquoi j’étais arrivée là,  chez la Reine des Elfes.
 
Depuis,  j’étais revenu chaque jour lui apporter une friandise pour l’aider à supporter les peines de sa rose.  Et chaque jour elle m’avait transmis un peu plus de sa magie.  Lorsque je sortais de la forêt, ma vie s’en trouvait chaque fois transformée, améliorée.  Quant aux elfes et à leur extraordinaire souveraine, ils apprenaient chaque jour un peu plus, du moins je m’y efforçais,  que les humains après tout,  n’étaient pas si mauvais…  et que malgré les apparences,  ils étaient capable d'aimer.

Ce soir en empruntant le sentier à la sortie du petit bosquet, je l’aperçu qui attendait.  L'étranger.  Il avait de grands yeux effrayés et regardait frénétiquement tout autour de lui.  Il guettait nerveusement,  comme je le fis moi-même il n’y a pas si longtemps.  Je ne lui parlai pas.  Je savais à présent qu’il faut laisser chacun découvrir en son temps, son propre chemin.  Inconsciemment j’avais porté la main sur mon cœur là où la flèche magique avait si doucement frappé et en passant tout près de lui, je lui avais fait un léger signe de la tête.  J'étais une passante semblable à toutes les autres passantes, rien de particulier, si ce n'est ce léger sourire... et cette lueur dans le regard, quasi imperceptible.

 

Jamais plus, je ne cueillerais les roses.

 

 

Suite et fin... (Partie VI: Épilogue)

 

 

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